Decode the Virus
Un virus mortel se propage sur toute la planète... Heureusement, des chercheurs de la faculté d’Orsay ont mis au point le remède permettant de sauver le monde. Par sécurité, il a été enfermé dans un coffre. Mais la combinaison a été perdue !
Aux douze étudiants de première année de Master 1 Life Sciences and Health - International Track, de remplir la mission qui leur est confiée : trouver les indices et exploiter leurs connaissances en génétique afin d’accéder à l’antidote, et ainsi sauver l’humanité !
La vidéo d‘introduction plante le décor et plonge les joueurs directement dans le vif du sujet. L’équipe se met en branle et met à jour de nombreux indices : une frise colorée, des livres, des documents scientifiques, un disque de décryptage, une tablette, des morceaux parsemés d’un tableau du code génétique, une boîte fermée par un cadenas à cinq lettres et une autre fermée à clé, un document avec quatre séries de quatre nombres, une loupe binoculaire, un cryptex, une affiche…
Tout indique que la frise colorée correspond à une séquence d’ADN à retrouver, les couleurs rappelant certains des éléments découverts. Les fragments de séquence se révèlent un à un, au sein des petits groupes s’étant partagé les indices.
« The enigma is embedded in a cell in metaphase... »
Des images de cellules en division scannées avec l’application HP Reveal mènent à un premier triplet de lettres. La loupe binoculaire permet de découvrir une série de minuscules caractères sur un autre document. Sont résolus aussi un quiz sur une célèbre expérience en génétique (Meselson et Stahl), ainsi qu’un message chiffré en code César. Des résultats d’expériences curieusement tachés mettent les joueurs sur la piste d’un long fragment. Enfin, des séries de chiffres (indiquant en fait chacune un numéro de page, de ligne, la position d’un mot et d’une lettre), associées à des ouvrages et documents, permettent aux étudiants de retrouver des lettres dispersées dans ces textes. La séquence d’ADN est complète !
Aux joueurs de montrer désormais leurs compétences en exploitant cette séquence d’ADN et le tableau du code génétique afin d’obtenir une série de cinq lettres, constituant le code du cryptex.
Celui-ci libère une clé et un document. La clé ouvre la seconde boîte, une lampe à UV est désormais disponible ! Une paramécie ainsi éclairée dans un document met les joueurs sur la piste d’une modification de la séquence ayant ouvert le cryptex, permettant cette fois d’ouvrir le cadenas à lettres, et d’enfin libérer l’antidote. Le monde est sauvé !
Les lecteurs les plus assidus de S’cape auront peut-être reconnu ici la structure d’un jeu d’évasion pédagogique déjà décrit sur notre site. Il s’agit en effet de l’adaptation de Code Nobel, un escape game créé pour des élèves de lycée (Première S), qu’Odile Bronchain et François Agnès, enseignants-chercheurs à la faculté d’Orsay-Paris-Sud, ont remanié pour leurs étudiants de Master International. Le scénario de l’escape game d’origine, simple et convergent, facilite son appropriation et les modifications dans d’autres contextes. Les objectifs des deux comparses : souder un groupe qui va travailler ensemble pendant un semestre grâce à un jeu d’équipe, à la manière d’une tâche complexe de groupe ; c’est aussi une manière de commencer par des révisions ludiques avant le menu principal (socle Master 1), dense à Paris-Sud.
François avait déjà participé à un premier travail d’adaptation de l’escape game niveau lycée dans un but de formation aux jeux d’évasion pédagogiques pour les enseignants et enseignants-chercheurs [1]. Un brainstorming au sein d’une équipe d’enseignants de lycée et d’université avait mené à ajouter au jeu une complexification notionnelle de niveau post-bac (le code génétique n’est pas si universel que cela) et des éléments ludiques tels que la lampe à UV révélant un schéma caché, ou encore le cryptex renfermant une clé.
Cette fois, Odile et François sont allés plus loin. Tout d’abord en traduisant et en adaptant les contenus en anglais, public international oblige. La vidéo d’introduction, réalisée avec l’aide de tout une troupe d’enseignants-chercheurs et d’étudiants, témoigne de cette volonté d’offrir un jeu sur-mesure, à la scénarisation et à l’accroche extrêmement motivantes. Ensuite, en modifiant une partie de la première série d’énigmes, toujours dans l’esprit de se mettre au niveau de connaissances des étudiants sans perdre de vue le jeu. Une des énigmes se réfère à la technique de l’électrophorèse [2], étudiée durant les premières années universitaires : le niveau de compréhension requis pour la résoudre est élevé, mais il faut aussi faire preuve d’astuce en remarquant la tache présente sur le document… La coopération entre talents variés et l’intelligence collective jouent ici pleinement. Les deux enseignants ont aussi pensé à intégrer des coups de pouce, sous forme de QR-codes, notamment pour cette énigme.
Odile et François signent ici un beau travail et un jeu d’évasion très abouti, ayant permis de fédérer un groupe d’étudiants étrangers se connaissant encore à peine et quelque peu déracinés. Nul doute que nos deux enseignants seront passés à leurs yeux pour des êtres bien loufoques… Un grand bravo aux deux « weird teachers » !
[1] Cette première adaptation, jouée aussi au CLIC2018 - Congrès de la Classe Inversée - est décrite dans l’article La Grande Inversion.
[2] Il s’agit ici de la séparation par électrophorèse de fragments d’ADN utilisée pour l’élaboration du séquençage ou la cartographie de restriction.
le 8 novembre 2018